Endymion
Un objet de beauté est une joie éternelle
Son charme ne fait que croître; et jamais
Ne sombrera au néant, mais restera toujours
Pour nous un havre de calme, un sommeil
Plein de doux rêves, de santé et d’un calme respir.
Aussi chaque jour qui passe, nous tressons
Une guirlande de fleurs pour nous lier à la terre,
Malgré le désespoir, l’inhumaine disette
De nobles créatures, malgré les jours lugubres,
Les chemins ténébreux et malsains
Où marche notre quête : oui, en dépit de tout,
Une forme de beauté vient enlever le suaire
De nos esprits en deuil. Ainsi font le soleil, la lune,
Les arbres jeunes ou vieux qui offrent leurs premières ombres
bienfaisantes
Aux humbles brebis ; ainsi les jonquilles
Et ce monde verdoyant où elles vivent ; et les clairs ruisseaux
Qui se font un couvert de fraîcheur
Contre la brûlante saison ; ainsi le fourré au cœur des bois
Richement parsemé de la beauté des roses musquées :
Ainsi pareillement les grandioses destins
Que nous avons imaginés pour les plus grands des morts,
Tous les contes merveilleux, lus ou entendus :
Fontaine intarissable d’un breuvage immortel
Qui coule jusqu’à nous du bord même des cieux
Et ce n’est pas seulement pendant une heure brève
Que ces essences nous pénètrent ; non, comme les arbres
Qui bruissent autour d’un temple bientôt deviennent
Aussi précieux que le temple lui-même, ainsi la lune
La poésie – cette passion – gloires infinies
Nous hantent jusqu’à devenir une lumière de réconfort
Pour nos âmes et s’attacher à nous d’un lien si puissant
Que, dans le soleil ou sous un ciel couvert et sombre,
Il nous faut toujours les garder près de nous – ou mourir.
Endymion, Ouverture, John Keats, 1818. trad. Jean Briat.
"Here Lies one whose name was writ in water"
Epitaphe gravée sur sa stèle.
Lumière de longues ombres,
le square s'est vidé
aux avertissements municipaux.
Seuls désormais,
nous ne pouvons
à l'insistant siffleur,
arrêter, cesser
de nous enlacer.
Lundi 9 mai 2011, Le Sully, seul
tant de photographies non prises,
de moments oubliés de ta mémoire.